S’il y a bien une chose à laquelle je n’étais pas préparée en arrivant en Chine, c’est à l’omniprésence inévitable des Ayi(s?).

Ayi (阿伊 – littéralement « tata »), est un terme quasi familial qu’on emploie communément pour s’adresser à une femme plus âgée que soi, en particulier quand des enfants sont en jeu alentour.

Concrètement, l’Ayi est la nounou-cuisinière-femme-de-ménage taillable et corvéable à merci employée par une famille pour s’occuper du foyer et de la progéniture.

Attention, il ne s’agit pas d’un concept imaginé pour plaire aux expatriés en mal d’aide au bien-être du logis et de gastronomie chinoise, c’est même presque un principe de vie ancré dans les mœurs. L’Ayi a une fonction sociale reconnue de longue date et amplement usitée aussi dans les familles chinoises.

Principe difficile à admettre pour l’ayatollah de la garde en collectivité que je suis… je ne prétendrais pas qu’elle est incontournable, car je connais un certain nombre de parents qui n’y ont pas recours, mais son côté presque institutionnel n’en est pas moins avéré.

Difficile de critiquer une pratique aussi communément répandue, autant que de remettre en cause ses bons côtés : avoir une Ayi te permet d’oublier illico qu’un jour tu as su repasser, d’offrir à ton enfant une éducation « à la chinoise » (en une jolie symbiose entre le culte du tout petit et celui de l’enfant unique… les petites personnes sont sacrées ici), de constater qu’en quelques mois il saura mieux comprendre et parler cette langue que toi en douze ans d’efforts acharnés, et te permettra d’être au courant de tous les derniers ragots de ton lieu de résidence.

En contrepartie, tu oublieras illico qu’un jour tu as su repasser, il pourra t’arriver de culpabiliser à l’idée de ne pas travailler et de pourtant avoir recours à du personnel de maison (appelons un chat un chat), tu verras ton trésor d’amour dernier né se muer en un tsunami capricieux prompt à jeter à terre tout ce qui lui tombe sous la main à la moindre frustration, et tu pourras constater, au regard amusé de ton Ayi, que la super affaire que tu viens de faire à Yashow est en réalité une cuisante arnaque.

Mais au moins pourras-tu te gausser de tenter au quotidien un vrai dialogue interculturel franco-chinois.